Printemps Public

Où est donc passé le soleil de début mai ? Retour sur une balade bordelaise du premier mai ensoleillé.
Nous avions décidé d'aller voir les récentes serres qui sont venues compléter le jardin botanique, en rive droite, mais fête du travail oblige, elles étaient fermées.

Une promenade à la Bastide, au nord de l'Avenue Thiers entre la Garonne et l'église Sainte-Marie, est toujours un dépaysement: à chaque visite, un nouveau bâtiment est sorti de terre sur cette rive droite longtemps délaissée, et non classée... Si les architectures modernes, regardées individuellement, sont esthétiques, la cohérence de l'ensemble reste aléatoire et heurte parfois le regard, surtout aux jonctions avec du bâti plus ancien. Le quartier, majoritairement résidentiel, comporte aussi quelques grosses entreprises et des annexes des facultés, mais beaucoup trop peu de commerces de proximité: les rues sont toujours désertes, la largeur des voies semble démesurée, créant un certain malaise. Les travaux mal achevés ajoutent à l'ambiance d'une ville fantôme.
Le jardin botanique crée l'évènement dans ce paysage: en approchant, la végétation rassure, même si les dernières réalisations autour des serres sont encore peu lisibles. Une bordure fleurie contre un grillage répond au béton environnant.

Trouvant donc les serres fermées, nous sommes entrés dans le jardin botanique, accompagnés par le concert d'un étourneau. C'est loin d'être un de nos jardins préférés: construction géométrique, pas d'espaces intimes, cheminements parfois vides et surtout un cruel manque d'ombrages en été. Mais pour cette journée printanière, nous n'étions pas les seuls à venir y profiter du soleil, croisant familles ou couples venus goûter ce petit bout de printemps cerné d'immeubles.

Au fil de nos pas, j'ai trouvé le jardin botanique plus agréable qu'à l'accoutumée, me prouvant à moi-même mon argument face à ses détracteurs: ce jardin est jeune, il poursuit sa croissance et les différentes séquences affirment petit à petit leur identité. Sa construction géométrique répond à sa vocation d'exposition, tout en ménageant des espaces de repos (mais manquant d'intimité) et intégrant une vaste pelouse centrale que le public investit de jeux de ballons, animant agréablement l'endroit.
Les plantes présentées sont intéressantes. La partie Est est consacrée aux céréales du monde, aux plantes potagères et à certaines plantes sauvages utiles. Dans les bassins servant à l'irrigation, tout un écosystème aquatique s'est développé, accueillant même de petites grenouilles. Une collection de mimosas complète cet espace, ainsi que quelques curiosités botaniques tel ce TOONA sinensis au feuillage rose. La collection de plantes grimpantes offre une autre trajectoire, mais elle est délaissée par le public en l'absence de cheminement cohérent et de véritable point d'appel. S'approcher de chaque pied s'accrochant aux structures métalliques est épuisant sous le soleil.

Après la pelouse centrale, la partie Ouest du jardin offre au visiteur une reconstitution des différents milieux naturels girondins, avant de déboucher sur un petit étang. L'entretien semble ici aléatoire et tous les milieux n'ont pas pu se développer correctement: une belle idée d'architecte-paysagiste, qui a du survoler la technique... Les interdictions d'accès répétées sont aussi un peu agaçantes, et pas mal d'enfants ont du mal à résister devant les rochers tentant de symboliser les sections à falaises de la Garonne et son estuaire, quand on s'imagine plutôt le  Rocher aux Singes de Vincennes...
En revanche, la forêt océane et le milieu dunaire sont particulièrement réussis, jusqu'à déstabiliser l'esprit selon certains axes de vision: mais où est donc passé Bordeaux ?!